Nicole n’a pas revu sa famille avant de mourir. La dernière fois c’était il y a 35 ans. Après, la maladie a pris le dessus et a éloigné progressivement Nicole de ses proches, de ses ami.e.s et de toutes ses relations sociales. Au moment de son décès, les organismes sociaux ont retrouvé puis contacté les frères et sœurs de Nicole. L’une de ses sœurs connaissait les coopératives funéraires et s’est donc rapprochée de Syprès.
Passées les formalités administratives, nous avons commencé à reconstituer les morceaux d’histoire de vie, l’environnement, l’univers de Nicole. Nous avons échangé avec sa sœur, avec les éducateurs, les éducatrices, son tuteur et avec les agents de l’hôpital. Nous avons aussi écouté l’histoire en creux, celle qui n’est connue de personne, les replis, les silences. Et puis nous avons compris, ce quotidien qui est arrivé à trouver sa place avec la stabilité du logement social, les éducatrices et éducateurs référents qui lui rendaient visite. Chacun.e a pu témoigner de leurs manières de rentrer en lien avec Nicole, de ses habitudes de vie, ses recettes de cuisine…
Très vite nous avons compris que notre accompagnement serait différent : pour nous, ce qui se jouait dans les quelques jours des funérailles serait la mise en lien de la famille de Nicole avec les personnes qui l’ont connue dans sa dernière partie de vie.
Il fallait ouvrir la possibilité de recoller une histoire après une absence de 35 ans. Deux mondes avaient besoin de s’écouter, de se comprendre et de témoigner. Nous avons donc construit ensemble une cérémonie civile très simple, Yann a écrit un hommage à partir de tous ces éléments. La présence des équipes du foyer avec la famille nous semblait très importante, comme la possibilité d’une rencontre plus informelle après la cérémonie. Cet aspect de l’organisation est essentiel: tous les frères et sœurs de Nicole venaient de très loin et repartaient dès le lendemain. Si nous ne pouvions pas organiser cette rencontre, elle n’aurait jamais lieu.
Nous avons retrouvé une belle photo, que nous avons agrandie, dupliquée et encadrée pour les frères et sœurs (avec leur accord bien entendu!). Nous avions une appréhension : comment chacun.e allait recevoir cette image nouvelle de Nicole ? Comme on s’y attendait, la photo a surpris, même choqué (comment ne pas l’être après tant d’années), mais elle a apporté un nouveau morceau du puzzle de la vie de Nicole. Les autres morceaux ont été apportés par chacune des parties.
Comme pour beaucoup de personne que nous accompagnons, on ne finit pas le puzzle. Des pièces manquent – parfois on ne les montre pas toutes – là deux parties ont pu enrichir le tableau d’une personne à qui nous avons pu rendre hommage.
Bonjour, c’est une très belle histoire. J’aurais aimé en vivre une similaire avec les enfants et petits enfants de mon épouse, bien sûr avant son décès, mais au moins après. Bravo à tous d’avoir su l’organiser et y participer.
Ce témoignage permet de mettre en évidence que la coopérative funéraire Syprès n’a pas pour seule fonction »d’enterrer les morts ».
Ce temps de la mort qui survient me semble être un moment privilégié pour s’arrêter, se relier, s’écouter…c’est précisément cette approche de la vie et la mort qui m’a intéressée pour devenir Coopérante de Syprès